1981-1983 / 8RPIMA
Chef de corps : Lieutenant-colonel Michel ZEISSER
LE HUIT TROP VITE
Le 28 juillet 1981, je prends le commandement du régiment que j'avais choisi en 1958 à la sortie des écoles et au sein duquel je faisais mes premières armes comme chef de peloton à la compagnie Portée, dans le constantinois et sur la frontière tunisienne
La moitié du régiment se retrouvant en Centrafrique, je me rends à BOUAR où, bien accueilli, je prends contact avec les compagnies présentes dont les cadres et parachutistes paraissent ravis de faire leur métier dans un contexte connu de la plupart.
A mon retour à Castres, je constate le travail accompli par mes prédécesseurs, le régiment de professionnels est parfaitement intégré dans sa Division et ne rencontre aucune difficulté pour recruter, s'instruire, s'entraîner et se reconditionner. Il me reste à donner les impulsions et à obtenir les moyens pour maintenir le niveau opérationnel. Dans ce domaine, le 8 peut poursuivre l'utilisation de la colonie de vacances de la SNCF à PORTE-PUYMORENS grâce à son acquisition par la Vème Région Militaire.
Le soldat de métier, s'il se sent bien dans son environnement professionnel, dans sa famille, dans sa garnison, rêve d'«Aventure».
A début du premier semestre 1982, un bon «créneau» apparaît : les Nations Unies demandent à la France l'envoi au Liban d'un bataillon opérationnel de 650 hommes pour renforcer la F.I.N.U.L. : le FRENCHBAT.
Bien que les 1ère et 2ème compagnies ne soient pas disponibles et qu'une unité élémentaire doit être envoyée en Centrafrique, le régiment répond favorablement à la demande. Ce sont les «Marie Louise» de la 11ème compagnie qui vont partir à BOUAR et reviendront couverts d'éloges.
Le FRENCHBAT réunissant alors les 3ème et 4ème compagnies, la C.A. et partie de la C.C.S., se prépare pour la mission de mars à mai et débarque à Beyrouth le 28 mai à 6 heures. Dix heures plus tard, après avoir traversé Beyrouth, Saïda, Tyr, et parcouru 80 kilomètres, il se déploie au sud du LITANI avec la totalité de ses unités et matériels.
Dès le lendemain, les casques bleus du 8 occupent les checkpoints et les postes d'observation, patrouillent et contactent les responsables locaux et les populations.
Tout avait été préparé et planifié par les précurseurs, mais rien ne va se dérouler comme prévu.
Les hommes du huit relèvent un bataillon nigérian au sein duquel existent des tensions, les cadres nigérians sont aux abonnés absents et plus d'une centaine de leurs soldats ne veulent pas quitter leurs cantonnements. Ils voient à compter du 1er juin la préparation de l'offensive «Paix en Galilée»; des drones survolent la région, l'aviation et l'artillerie israéliennes interviennent les 4 et 5 juin sur le château de Beaufort et les villages au nord du LITANI tenus par les palestiniens. A compter du 6 juin 11 heures, ils subissent l'engagement d'une division blindée israélienne sur les deux axes principaux de leur zone d'implantation. Ils se montrent courageux et disciplinés, tentent d'obstruer les itinéraires, vont jusqu'à monter sur les chars pour les arrêter sans ouverture de feu et ainsi marquer la violation de l'aire des Nations Unies.
Face à 200 chars, 500 M113, 60 pièces d'artillerie, 1000 véhicules logistiques avec leur escorte, ils plient puis se relèvent vite pour sécuriser leur zone, interdire l'implantation des milices pro-israéliennes, prendre soin des populations et se lancer dans la récupération
de matériels sensibles sur les véhicules blindés israéliens et surtout syriens abandonnés au nord du LITANI.
Mais, ils supportent mal les contraintes imposées à la F.I.N.U.L., les «cowboys» des
services de renseignement israéliens et le flux logistique permanent de TSAHAL parfois perturbé par des mains non innocentes ayant modifié le fléchage et le pancartage.
Un sentiment d'inutilité apparaît progressivement et les regards se tournent vers le nord.
Le siège de Beyrouth commencé le 10 juin se poursuit, les israéliens n'étant pas entrés dans la ville, les milices palestiniennes sont évacuées à partir du 21 août sous la protection d'une force multinationale d'interposition à laquelle aucun élément du régiment n'a participé.
Le 14 septembre Bechir Gemayel président de la république libanaise est assassiné, du 16 au 18 septembre se produisent les massacres de populations palestiniennes dans les quartiers de SABRA et CHATILA; ils sont perpétrés par des inconnus autorisés à entrer dans ces camps par l'armée israélienne.
Un nouveau «créneau» s'ouvre lorsque le gouvernement libanais demande le déploiement d'une force multinationale de sécurité pour assurer la protection des populations et restaurer son autorité dans Beyrouth.
Les premiers éléments de la participation française arrivent le 24 septembre, les 1ère et 2ème compagnies venant de Castres suivent.
Simultanément le FRENCHBAT moins une compagnie (CA) est remis à la disposition de la France et reçoit l'ordre de rejoindre la capitale libanaise. Les casques bleus retrouvent avec joie leur béret rouge au franchissement du LITANI et sont escortés par TSAHAL jusqu'aux portes de Beyrouth le 29 septembre.
C'est un moment privilégié, à l'exception de la C.A. et de la 11ème compagnie, le 8 est à nouveau réuni. Il se déploie à cheval sur la «ligne verte» sans difficulté du côté musulman (Beyrouth ouest), moins aisément du côté chrétien (Beyrouth est) fief des forces libanaises (milices chrétiennes). Chaque compagnie a la responsabilité d'un quartier et met en place des postes de section.
Les hommes du 8 s'installent dans des immeubles abandonnés, en construction ou partiellement en ruine, patrouillent de jour et de nuit, aident l'armée libanaise aux checkpoints urbains, fouillent immeubles et écoles où ils découvrent des tonnes de munitions et des centaines d'armes accumulées par les palestiniens. Leur présence et leur action sont hautement appréciées des Beyrouthins, ils sont considérés, choyés et parfois invités, ils ont l'autorisation de sortie jusqu'à 22 heures lorsqu'ils ne sont pas de service. Cette ambiance permet d'organiser de nuit la cérémonie de passation de commandement de la 1ère compagnie sur la place des canons au cœur de la ville. C'est un moment rare car bientôt les démons libanais cachés sous les cendres réapparaîtront et feront en sorte que le peuple libanais se déchire à nouveau.
Les hommes du 8 ne verront pas l'effondrement de ce qu'ils ont tenté de bâtir, ils rentrent à partir de début décembre.
Au cours de l'année 1982, le régiment a déployé 1 100 hommes au Liban et en Centrafrique. A leur retour, une importante cérémonie nocturne est organisée en liaison avec les anciens combattants de «Rhin et Danube». Les castrais assistent en nombre à la prise d'armes et au défilé de toutes les unités du régiment.
Fin février 1983 arriva ce que je ne pouvais envisager, quitter trop vite, la larme à l'oeil, les hommes du 8. Certains n'avaient peut-être pas toujours compris ce qu'ils avaient vécu mais ils m'avaient suivi. Je leur en suis à jamais reconnaissant.
GCA (2S) Michel ZEISSER
Commandant en second : Lieutenant-colonel Pierre JOURDAIN
Chef du BE : Lieutenant-colonel Jacques MOURGEON
1Cie : Capitaine Jean BRANTSCHEN
2 Cie : Capitaine Guy DE HAYNIN DE BRY
3 Cie : Capitaine Jean-Loup MOREAU 1981,Capitaine Jacques BALCH 1981-82
4 Cie : Capitaine Alain AMORY
CA : Capitaine André BLANCHARD
CCS : Capitaine Gabriel GLORIEUX
11 Cie : Capitaine Elrick IRASTORZA
2 ANS DE COMMANDEMENT
ALLO ANCRE ICI DRAGON
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